samedi 13 juin 2009

Restaurant Au Sanglier des Ardennes - Oignies-en-Thiérache




Restaurant Au Sanglier des Ardennes - Oignies-en-Thiérache




En ce joli mois de mai, nous voici pour la seconde fois consécutive en province de Namur. Mais l’adresse « vaut le voyage » à elle seule, pour paraphraser un célèbre guide touristique. Le Sanglier des Ardennes, à Oignies-en-Thiérache, fait partie de ces incontournables que tout gastronome se doit de fréquenter et où il retourne avec plaisir. Une véritable institution dans la région, riche de trois générations déjà et d’une histoire qui fleure bon le terroir. La voici en quelques lignes.

Georges et Odette Buchet, bouchers, s’installent à Oignies en 1936, à quelques maisons de l’emplacement actuel du restaurant. Georges Buchet achète le restaurant, une magnifique bâtisse en pierres du pays, en 1938 et y installe la boucherie, peu de temps avant le début de la 2e guerre mondiale. En cette période difficile où toute arme est prohibée, le grand-père Georges chasse… le sanglier au couteau avec quelques compagnons. Ils en auraient ainsi tué près de trois cents pendant l’hiver 1942, aidant les habitants du village à se nourrir. Georges Buchet fut arrêté par les Allemands et déporté comme prisonnier politique.

Odette Buchet se retrouve seule avec ses deux enfants et reprend les commandes de la boucherie. Elle décide, pour s’en sortir, de préparer des plats du jour pour les représentants de commerces de passage dans la région (Oignies était un village bien plus important à l’époque, comptant notamment quelques 80 bistrots et plusieurs industries). A la libération, Georges Buchet rentre au pays et ouvre la taverne avec son épouse, puis quelques chambres et agrandissent le restaurant.

En 1976, leur fils Jacky et son épouse Marie-Rose reprennent l’établissement. Trois ans plus tard, le petit-fils, Rudy, démarre son apprentissage au Vieux-Colmar à Saint-Ghislain et effectue ensuite une série de stages dans des maisons prestigieuses. Parmi celles-ci, Mon Manège à Toi, Bruneau ou encore l’Ecailler du Palais Royal. Rudy revient à Oignies en 1986 et épaule son père, le truculent Jacky Buchet. Aujourd’hui, la succession s’est assurée en douceur et la direction des fourneaux est désormais dévolue à Rudy… qui reste sans doute à l’écoute des conseils paternels. La cuisine s’articule forcément autour des produits de terroir et du gibier en saison mais fait également la part belle au poisson. Il faut dire que les rivières sont nombreuses dans la région et la Meuse n’est qu’à quelques encablures. Sans oublier une cave à faire pâlir de jalousie les oenophiles les plus avertis.

Et maintenant, assez parlé… passons à table ! Les mises en bouche étonnent dans ce décor entièrement dédié au retour de chasse (bois de cervidés accrochés aux murs, têtes d’animaux naturalisés,…). Pour l’occasion, il s’agissait de fruits de mer : huître, amandes et crevettes grises à décortiquer accompagnées de l’apéritif maison, une méthode traditionnelle agrémentée de crème de cerises. La première entrée fait elle aussi la part belle aux produits de la mer avec une roulade de saumon mariné et thon rouge au wasabi. Le vin, un Sylvaner 2003 de la maison Trimbach, laisse une belle sensation de gras et s’accorde à merveille avec le saumon (pas trop) fumé et le wasabi (moutarde japonaise) pas trop piquant. L’ensemble est relevé d’une sauce crème – ciboulette et offre un intéressant contraste acidulé – salé.

La deuxième entrée est plus classique, si l’on peut dire. Les quenelles sont présentées en cassolette et procurent, elles aussi, une sensation de gras en bouche. Leur texture est agréablement consistante (pas spongieuse) et la sauce homardine légère et crémeuse. L’accord avec le vin est assez surprenant mais superbe : le Chablis du Domaine Chantemerle soulignant le côté gras de ce plat tout en ajoutant de subtils arômes de poire. Ensuite, petite pause dans ce menu – festin, un sorbet à la myrtille et au vin rouge vient à point pour rafraîchir les papilles.

Car la suite mérite une attention particulière ! La présentation de cette volaille fermière aux morilles, sauce au vin Jaune est pour le moins originale, la poularde étant découpée en tronçons de roulade farcie des champignons. Le riz basmati s’apparente pour l’occasion à un risotto et l’ensemble est particulièrement harmonieux… et copieux. Le Côtes du Rhône, Domaine de la Réméjeanne 1999, pourrait passer pour une grossière faute de goût. L’accord est pourtant intéressant… et inattendu pour accompagner ce plat, fierté du Jura et parmi les réalisations fétiches du Sanglier des Ardennes

Petit détour par le chariot de fromages affinés dont la diversité n’est certainement pas la moindre des qualités. Vient ensuite le dessert, que nous n’avons pas eu l’occasion de goûter, les fraises n’étant pas encore cueillies. Ne parlez pas de fraises importées à Rudy Buchet, ce n’est vraiment pas son « truc » ! On espère simplement que la récolte sera bonne… tout en vous donnant quand même une piste, connaissant un peu les habitudes de la maison : la soupe de fraises et le granité aux pamplemousses seront vraisemblablement servis en deux étapes distinctes.

Enfin, laissez un peu de place pour le café, servi en cafetière, et le petit morceau de tarte au sucre ponctuant un repas qui s’inscrira assurément dans vos meilleures (re)découvertes gastronomiques de l’année.




Restaurant Au Sanglier des Ardennes
Rue J.-B. Périquet, 4
5670 Oignies-en-Thiérache (Viroinval)
Tél. 060. 39 90 89
www.ausanglierdesardennes.be


Texte publié dans Touring Explorer - mai 2007

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